samedi, octobre 07, 2006

Ailleurs, c'est ici...

illustration d.m.





« Tu ne me chercherais pas, si tu ne m’avais déjà trouvé » Cette pensée de Pascal reprise par d’autres philosophes et mise en exergue aujourd’hui par Camille sur son blog (voir dans Fil à fil : Lagunedune), me fait réagir (et surtout certains commentaires des visiteurs de ce site). Comme ce commentaire est un peu long et surtout un peu « rentre-dedans », je préfère, par respect et amitié pour elle, le déposer sur l’ « Hombre de nada » dont la vocation est justement d’aborder ce genre de réflexion.

Tout le monde, ou presque, fait comme s’il éxistait réellement un « ailleurs merveilleux » blotti dans dieu sait quelle dimension de l’univers et qui apporterait le « bonheur d’âme » à « cellui » qui le frôlerait par le truchement d’un regard intérieur inspiré et « méditativement » travaillé. C’est la base des religions et du mythe paradisiaque. Or, jusqu’à plus ample informé, l’Homme a les pieds ancrés sur sa planète et ses racines dans la glaise des tâtonnements de l’évolution des espèces. A y regarder de plus près, le « monde rêvé » est l’antithèse exacte de la réalité humaine. On ne peut nous en vouloir : cette réalité est tellement écœurante et dévastatrice pour notre propre regard-miroir… Tout est bon pour échapper au constat d’horreur : les religions, le repliement dans des bulles ou cocons « épargnés », le mysticisme, ou, plus grave, la dissolution utopique du mal de vivre dans la toxicomanie et enfin, pour ceux qui n’ont pas trouvé la voie, le suicide.
Aucun de ces axes de fuite de la réalité, de ces échappatoires, n’a jamais fait évoluer la civilisation dans un sens positif. Je dirais même, au contraire !
Car pendant que les églises de toute sorte bruissent de la ferveur des prières apeurées, pendant que « Sages » et mystiques s’adonnent dans la position du lotus à des pérégrinations nimbulatoires, pendant que des légions de noceurs privilégiés se vautrent honteusement sur la sueur et la misère des crève-la faim, pendant que des millions de minots sans repères constructifs et sans avenir imaginable se fracassent chimiquement un cerveau qui leur fait si mal, pendant qu’une génération vieillissante essaie d’échapper à la normalité naturelle du phénomène de vieillissement et de la mort sous une cataracte de cachetons et d’ampoules miraculeuses, pendant que des milliers et des milliers de nos contemporains tirent à tout jamais sur eux-même le rideau définitif de la disparition volontaire, pendant ce temps-là, la lèpre humaine ronge la planète, Sa planète, et ses propres enfants. Et tous participent à la débâcle : les prieurs, les mystiques, les noceurs, les chimisés…et moi avec.
Tout le monde le sait et n’a de cesse de fuir cette triste réalité.
Ce que l’on cherche, ce que l’Humanité cherche depuis qu’elle a conscience de sa terrible infirmité morale, c’est ELLE-MÊME, EN BEAU !!!
Mais cette infirmité n’est peut-être pas rédhibitoire. Et si elle peut s’imaginer en BEAU, alors, oui, on peut espérer que l’Humanité va se trouver enfin, en grand, en fraternel, en Humain, avec le « H » majuscule, mais pas ailleurs, pas dans les nuages, pas dans les invocations, pas dans les pérégrinations éthérées, pas dans les dissolutions chimiques de la douleur, mais en ELLE, dans une socialisation ouverte à l’autre, une civilisation débarrassée de ses tares économiques et dominatrices.
Mais, m’objecte t-on parfois, « On ne peut pas changer le monde » … Alors… Chacun sa bulle et son moulin à prières pendant que coule, éternel et fougueux, le fleuve du sang des hommes et que s’éteint inexorablement la seule planète viable connue à ce jour.

Ceci dit, la toile de Camille jointe à cette citation de Blaise Pascal est de toute beauté et laisse entrevoir des possibilités de « Libération »

P.S : Jean, pour ce qui est de « Dieu » et de ses « élus, choisis » , je te conseille la pièce décapante de Nicolas Roméas : « Loup entouré de chiens à la tombée du soir ».


Texte versé au jeu du « Grand Tourniquet des Piliers du Temple » , dans les « tiroirs » .

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Les temples sont certes à réinventer et les portes à ouvrir ... Chacun à son rythme, chacun à son histoire ... Finalement, les intentions intimes n' en sont-elles pas l' unique message ...
Alors, je dis respect ... Si le chemin est de fraternité, de liberté et de compassion ... Peu importe la forme pour peu qu' elle inscrive l' homme en conscience éveillée de lui-même ... non de dissolution mais d' incarnation assumée ...
Bonne journée à toi, Hombre ... Nada est déjà un lieu, n' est-ce pas ?

Anonyme a dit…

Et que fais-tu à travers tes dessins Hombre? à travers ce rose du ciel qui surplombe le bleu-gris de la terre avec cette virgule noire, qui accroche le regard, qui dit que l'ailleurs est ici, et que l'esprit et le corps doivent s'y tenir, parce que c'est notre bateau?
Tu es une virgule qui accroche le regard, tout et chacun de nous le sommes...
Y aurait-il une seule bonne et honnorable façon de mener sa quête? d'arriver à bon port?

Anonyme a dit…

j'aime vos poèmes et vos illustrations

Anonyme a dit…

Cher Hombre,
Si Camille a mis cette citation de Pascal, c'est qu'elle l'a lue dans un contexte très spécial, celui de mon livre Samsarah ou la transmigration qui est un livre d'éveil à l'humanité dans le contexte de la Sciences et des biotechnologies à venir une citation parmi trois autres pour entrer dans un contexte : "science sans conscience n'est que ruine de l'âme" Rabelais, et "Si la vérité est terrible et cruelle, notre tâche ne doit pas être seulement de la supporter, encore moins de nous en consoler, mais de l'aimer" Nietzsche. L'image qu'elle en a retirée à été cette photo qu'elle a conçu et la musique qui allait avec. Oui, j'ai choisi la citation de Pascal reprise par Saint Augustin, parce que c'est un message d'espoir, l'espoir que "Dieu" ou le beau existe en toute chose, en creux, parce que je crois en l'Amour, en l'humanité, même s'il faudra me battre pour le faire ressortir. Ma façon à moi de le faire c'est d'écrire, à toi c'est de dessiner et de philosopher.
Je te souhaite une bonne journée, je suis heureuse d'être repassée par ton blog, je m'y étais déjà arrêtée.

Anonyme a dit…

- Merci, Juliette de votre passage et de votre petit mot réconfortant. Je viens de faire un très court passage sur votre blog, promis, je reviens (sans vous déranger dans votre travail...)

- Oui, Claude, je me rappelle ton petit mot, il y a quelques semaines.
Où puis-je trouver ton livre ? En librairie?

A très bientôt, en lectures partagées, j'espère.

Anonyme a dit…

Non pas encore, celui dont parle Camille et dont elle est une des premières lectrices sera publié l'année prochaine, il interresse un éditeur celui que j'ai actuellement mais j'attends d'autres réponses pour faire mon choix définitif.
Si ma démarche t'interesse j'ai un site en construction sur mes deux ouvrages il y a une amorce d'interview à Samsarah
http://claude-chatron-colliet.net/
La Garon aux éditions Thélès, sort d'ici la fin du mois.
A bientôt Hombre de Nada