dimanche, mai 27, 2007

leur monde est mâchoires

Il y a un an de cela,, je suis "invité" à une réunion de chômistes dans les locaux de Tonton ANPE. L'animatrice nous remet une feuille de tableau Veleda (95x65) et nous donne la consigne : -"Vous avez une feuille, vous avez une heure, représentez-vous sur votre lieu de travail. Vos compétences, votre savoir-être... tout, quoi!"

Une heure après, j'avais fait ça. Je vous passe les "rendus" de mes collègues. J' ai fait en sorte de passer le dernier, j'ai exposé ma vision d'Apocalypse et juste posé la question suivante:

- "C'est un poète, un écriveur de théâtre et de poésie, il sait faire bien que ça. Bien, mais que ça. On veut absolument qu'il choisisse entre maçon et plombier. Que doit-il faire: la corde ou le TGV en pleine poire?"

Personne a su répondre, juste dire que : "...faut bien... tu comprends... on est bien obligé... dans la vie, on fait pas c'qu'on veut... c'est déjà si difficile... les gens ont toujours travaillé... faut d'abord penser à manger... le travail, c'est la dignité..."

Pauvre monde!

Et encore, l'autre taré nous avait pas encore fait avaler qu'il faudrait "Travailler plus pour gagner plus" !







































dessin d.m. stylo-bille/marqueur/ papier veleda.













samedi, mai 26, 2007

déjà des souvenirs...

Parce qu l'année dernière, c'était la 20 ème édition et qu'on avait mis le paquet? Parce que cette année, il y a des travaux à Châtillon qui font qu'une partie importante du lieu est indisponible (et pas n'importe laquelle: le coeur, le lieu du repas, une superbe salle archi-séculaire que l'on tapisse des photos des festivals précédents, genre Pôle Nord des festivaliers...) et qu'il fallait se rendre au diable pour les repas, cassant le rythme établi: apéro/repas/ librairie/ spectales/lectures/re-apéro..., parce que le programme semblait moins attrayant, parce que certains savaient qu'une partie des "piliers" des auteurs "estampillés" seraient absents? Un peu de tout cela a fait que cette présente édition a semblé molle, "light", en roue libre... Cela s'est ressenti au niveau de la Librairie Théâtrale, du nombre de repas, de la fréquentation du Bar, des spectacles. Cette année, pas une chaise à rajouter...Pour qui connait le jonglage des éditions précédentes!!!

Et puis les mots plus ou moins équivoques au cours des discours officiels, cette impression que ce Festival "dévore" les subventions qui pourraient se répartir ailleurs et autrement, pour d'autres manifestations... ça laisse un sentiment de fin de quelque chose...
De toute façon, il faut dire que ce Festival populaire manque souvent d'une dimension "militante" dans sa programmation. On y aime le théâtre ludique et émotionnel, l'approche des problêmes de la marche du monde effraie un peu.

Samedi soir, scandale, une troupe joue "La demande d'emploi" de Michel Vinaver. Une famille vit le drame du chomage. Personne n'écoute personne, entrelas de monologues qui se perdent dans le vide. Mal mise en scène, avec des acteurs non impliqués dans la réalité de leurs personnages, cette pièce a pris son monde à rebrousse-plaisir. Bien sûr, tous les défauts que j'ai dit, mais qui a vraiment envie d'un théâtre du désespoir et du vide existentiel? Peut-être pas le public de Châtillon et encore moins les "Auteurs Académiques" qui sont l'âme de cette manifestation. Car à Châtillon, il y a une Académie d'auteurs dont on peut se demander parfois ce qu'elle défend quand elle oublie de se moquer d'elle-même... Cette année, il manquait une bonne moitié de ces sommités et, à la rigueur, cela a supprimé des tensions palpables entre elles d'habitude.

Un spectacle a su faire l'unanimité : "Eloge du père qui m'assassina" de et par Luc Girerd.
Luc écrit extrèmement bien, maitrise une mise-en-scène d'horloger et ne vous lâche pas une seconde dans son personnage de garçon fracassé par un père désepérant d'égoïsme et de mépris des autres.
Du grand oeuvre, du théâtre de tripes.
On trouve en librairie la version roman de ce texte et d'autres écrits tout aussi passionnants. Luc Girerd. Si vous croisez, faites-vous plaisir, rentrez dans de l'écrit d'homme .
Cette année, vu la légereté dans la programmation (pas d'ateliers, peu de lectures), j'ai profité d'un vide énorme dans la journée de vendredi pour faire une manifestation "OFF" du Festival. C'était la deuxième fois que cela arrivait, la première ayant été l'oeuvre il y a quelques années de Alain Gras.
Vendredi, donc, rien de prévu avant 17 heures! Je propose donc aux organisateurs une lecture d'un de mes textes. Ca tombe bien, Chantal, une amie avec qui j'ai déjà travaillé, est demandeuse de lectures. 15 heures, donc, salle Lully, on dit "Comme un goût de cendre au réveil". Une vingtaine de personnes, déjà pas mal vu l'improvisation de la chose. Mais quelle écoute ! Et surtout, quelle ouverture pour cette écriture visionnaire!
Un groupe de jeunes étudiants qui ont écrit, une première cette année, une critique sur chaque spectacle, ont beaucoup apprécié ce conte poétique et ont écrit un article enthousiate. Quel bonheur pour un auteur-vermisseau!
Cette année, j'ai passé plus de temps auprès de mon présentoir de livres. En l'amicale compagnie des animatrices de la Librairie, hélas moins fréquentée. Françoise, Hélène, Marie-Paule, Claudy, toujours gentilles et attentives.
Un "petit" Festival, en somme, avec un gros nuage gris sur la tête, ce sera ce qui me restera de ces quatre jours remplis cependant de beaux moments et qui m'ont permis de tisser de nouveaux liens.
A l'année prochaine, j'espère vivement !










Salle Gérard Maré
" Une heure et demie de retard" / G Sibleyras/ Terre de Scène / Espace Bel Air

votre serviteur et Chantal Primet/ "Comme un goût de cendre au réveil"/ lecture/ Salle Lully


"Duo pour deux" / Guy Foissy / Théâtre de l'escarpin / Salle G Marin


"L'Hôtel des deux mondes" / Eric Emmanuel Schmit / Théâtre du Torrent/ Espace Bel Air


Séance rituelle de l'Académie des Auteurs. Ils sont venus, ils sont pas tous là... Foissy, Allègre, Doutreligne, Broussouloux, Poudeyroux, Larriaga, Haïm.



Emile, photographe omniprésent sur le Festival, un "oeil", un vrai talent, auteur d'un "fond théâtral" de 30 000 pièces : "Mascarille". Trouvable sur Internet.



Les jeunes étudiants en Théâtre qui ont suivi et commenté par écrit tous les spectacles. Une belle et présence et de riches commentaires.

Beaucoup de repères manquaient cette année, pas le traditionnel "Pot" offert par la Municipalité. Mais les discours ont fait surgir certains nuages quant à l'avenir... A suivre...


Le Bar, lui aussi victime des chamboullements. On n'a pas eu à y jouer des coudes, c'est dire!


l'équipe "Librairie". Les quatre Mousquetaires de la vente de livres de théâtre avec un sourire grand comme ça et des panières de bonbons qui vous font des clins d'oeil... Merci, mesdames!



des centaines de titres, du théâtre pour toute l'année.



Pour la 4 ème fois, le présentoir à roulettes du "bricoleur de textes" est accueilli amicalement à Châtillon. Sous les auspices de Marie-Paule et Chantal.



C'était pas dans la salle habituelle mais la qualité des repas n'a pas changé. C'est ça aussi, le Festival!
Chantal, Henri (Pdt Régional FNCTA) Alain (chef de fourmis organisatrices) Christianne...



Chantal et Guy, une dévotion au Festival. Elle aux lectures, lui, à la technique. Toujours de bonne humeur et ouverts.














mercredi, mai 16, 2007

pouvoir dire et être entendu...


Avec un groupe d'enfants qui m'a été confié, nous participons à un concours sur le thème de la protection de la nature. Notre idée: dans 30 000 ans, notre civilisation n'ayant pas pris les mesures nécéssaires, les derniers survivants de l'humanité, sur une Terre lessivée, dépouillée de presque toute vie, se retrouvent, démunis de tout, dans des grottes, des abris de fortune. Sur la paroi d'une caverne, des enfants jouent à mettre en dessins, trempant leurs doigts dans des flaques de boue rougeâtre, les récits légendaires de la "Vie d'avant le Cataclysme" que rabache un vieil homme. Ces animaux qu'on représente, on ne les a jamais vus, ils ont disparu depuis si longtemps, mais on les imagine avec envie. Si tout cela pouvait renaître un jour, des entrailles de la Terre !







Fresque réalisée avec les doigts à la gouache sur du papier d'emballage. 2,80 m/0,60. Pour l'occasion, nous avons aussi inventé de nouvelles lettres d'alphabet.



Evidemment, l'idée, c'est que nous fassions en sorte que le "Cataclysme" ne se produise pas. Et cela dépend de chacune des personnes qui visiteront l'expo où figure cette réalisation d'enfants.

Bon, allez, bisous à "toustes", je pars ce soir à Châtillon sur Chalaronne, pour ma cure annuelle de Théâtre.

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dimanche, mai 13, 2007

4 jours d'oxygène

la Chalaronne à Châtillon


Le 21ème Festival de Théâtre Contemporain de Châtillon sur Chalaronne, organisé par la FNCTA de l'Ain, c'est à partir de mercredi 16 au soir, ça finit dimanche soir. Quatre pleines journées de théâtre, des pièces jouées, lues, des rencontres, des débats, des repas comme on sait les mijoter dans les Dombes et surtout, de l'amitié!!! Pour moi, quatre milliards de filets d'oxygène. C'est ma seule "émmersion" de l'année. Je bois l'oxygène par tous les pores de la peau.

Hier, en avant-première, la Médiathèque de Châtillon organisait une lecture théâtrale, une "première" , pour sensibiliser ses adhérents, pour tendre une passerelle. C'est ainsi que j'ai eu le bonheur de voir lue ma pièce "Trois p'tits coquelicots" par les amis de la troupe de là-bas. Et avec quel talent! L'émotion dégagée du texte et de l'interprétation était palpable. Du beau travail!


BRAVO, les Artistes!




Bruno

Véronique


Marie- Paule
Encore merci aux amis acteurs/lecteurs et à l'équipe de la Médiathèque pour ce cadeau.
Pour les visiteurs de ce blog, je vous invite à découvrir cette pièce et d'autres textes dans les "tiroirs" juste là à droite.

dimanche, mai 06, 2007

de la "Normalité" de notre civilisation Economico-Commerciale (à suivre...)

Ce n’est pas la meute des loups affamés rodant au gel de la nuit qui empêchent Prud’Homme de dormir au chaud de sa couette, ce sont les hurlements des chiens qui savent les yeux rouges cherchant la faille de la palissade fragile. Et Prud’Homme fait taire le chien. On ne brise pas ainsi des rêves capiteux.
Il en est de même du poète qui montre que le chemin résonnant du pas lourd du troupeau n’est pas celui des bonheurs espérés. Qu’il se taise ! Avançant droit, creusant son sillon sous la charge des mouches harcelantes et respirant l’air saturé des poussières d’os de vies oubliées, la masse n’a cure des mots de l’homme au cou de girouette, elle suit imperturbable le destin de sa race. Droit devant, toujours, pas après pas, sans chercher à savoir le bien-fondé de la marche séculaire. Avançons, avançons, puisqu’il est évident qu’en ce mouvement réside l’essence même de notre existence, de notre raison d’être. La preuve n’en est-elle pas dans le fait que l’individu qui s’immobilise se voit immédiatement bousculé et écrabouillé par l’avancée immaîtrisable du fleuve ?

Quand un poète, un philosophe, un « ravi » du village, croit pouvoir dire qu’il pense que ce qu’on appelle « Normalité » de la marche du monde n’est en fait que le résultat de choix empiriques antérieurs, que la conséquence d’orientations et de manipulations au profit d’intérêts privés, que l’état social optimum permettant à une caste de s’approprier l’usage de l’énergie collective et les fruits de ce travail, quand ce poète- philosophe- ravi du village suggère que soit posée la question de ce qu’on imagine qu’est le « destin » d’un individu, sa Liberté, son Droit de choisir sa « Vie », que soit débattue celle de savoir à qui appartient chacun, qui a des droits sur le temps, la liberté, les actions, la conscience de chacun de nous, si l’espèce humaine n’a d’autre choix d’organisation que dans le fait économique, que dans l’exploitation des individus en vue de produire de la masse monétaire, si elle a le droit de mettre en coupe réglée et en danger de disparition le reste du tissu du vivant pour assouvir ces seules préoccupations économiques, ce poète, ce philosophe, ce ravi du village se voit renvoyé dans les cordes du ring de la liberté d’expression. Non pas que ses questionnement soient idiots, sans fondements, insultants, hors de l’intelligence collective mais parce que répondre à ces questions revient pour celui qui oserait se les poser à se regarder en face, à analyser sa propre existence et à accepter de reconnaître en elle une somme de renonciations, d’abandons, d’étouffements, d’amputations. Même pour qui croit sa vie « Réussie » !
Qui peut accepter de reconnaître de bon cœur qu’il a renoncé à ses passions, à ses attachements, à ses utopies, à ses valeurs, à la fraîcheur de sa conscience, à son propre « temps de vie », à la maîtrise de ses actions et de sa créativité, à ses pulsions naturelles ?
Qui peut accepter de reconnaître de bon cœur qu’il n’a de maîtrise sur rien de ce qui compose pourtant son quotidien : ni sur l’éducation de ses enfants et le temps qu’il leur consacre, ni sur son activité de chaque instant, ni sur son rapport à la nature (y compris la sienne), ni sur son langage, ni sur ses rapports humains, ni sur ses intuitions philosophiques, ni sur la marche de la société, ni sur sa santé, ni sur le sens de sa vie, ni ni ni ???
Qui peut accepter de reconnaître de bon cœur que depuis le berceau, on lui a volé, téléguidé sa vie ? Qu’il a marché à côté de ses propres pas possibles ? Qu’il n’a jamais été qu’une brindille au cours du torrent ? Que par usure, peut-être, par fatigue, par isolement, par inconscience, il a accepté la mutilation, la castration sur l’autel de la « Normalité » de l’histoire humaine ?
Qui peut accepter de reconnaître qu’il s’est fait avoir, dépouiller de sa propre « existence » ?
Qu’il a participé par la force d’inertie des choses à un jeu dont il aurait eut honte d’écrire lui-même les règles?
Alors, bien sûr, monsieur le poète, le philosophe, le « ravi » du village, si vous avez que des réflexions comme ça à nous proposer…

Pourtant, ce regard nouveau sur sa propre vie, cette prise de conscience de l’emprise écrasante de la société sur le destin des individus, cette révélation qu’il est d’autres chemins possibles à l’aventure humaine, du moins, à partir de ce jour, pour ceux qui vont arriver innocents des errements de leurs aïeux, cela pourrait provoquer un sursaut pour l’établissement d’une société nouvelle, de respect, de liberté, de solidarité. Une société d’humains non- marionettisés, responsables, entiers !

Une humanité où la masse mouvante et aveugle n’écraserait plus les « retardataires ».

Rêve de poète, de philosophe, de « ravi » du village.

Mais peut-être vaudrait-il mieux lapider sans attendre, et profitant de « l’air du temps » propice au « Libéral- Selectivisme », l’iconoclaste de la croyance en la « Normalité » de la Civilisation Economico- Commerciale ?

mardi, mai 01, 2007

Personne ne fera de moi une crevure...

En 95, aidé dans sa réflexion par des publicitaires qui ne nourrissent pas leur nichée avec du cassoulet de chez LIDL, Chirac avait la révélation soudaine que la France, que le peuple de France, était scindé par une « fracture sociale ». Des qui possèdent, qui jouissent et, en bas (comme le dira si bien Raffarin) , des gens qui mijotent dans le jus de la misère et du désespoir. Et l’idée slogan surgit de « réduire » la dite fracture. Tout un programme. Electoral. Et ça marche ! Non pas que la fracture soit réduite mais le candidat est élu. Y’a une justice !

Douze ans après, l’abîme s’est creusé, le cassoulet pour pauvres est encore plus dégueulasse et les riches, même millepatisés, n’ont pas assez de doigts pour tenir le compte de leur fortune. Les braves gens qui y ont cru se sont fait avoir. On va pas en faire un drame, ça fait partie de la « magie » des promesses électorales qui n’engagent que ceuss’ qui…

Seulement voilà, en douze ans, une transformation s’est produite. Extraordinaire. En profondeur dans la conscience même des individus-citoyens qui maillent le tissu de notre peuple. Cette fracture sociale, si vertigineuse, si incongrue dans ce pays qui se targue d’être la cinquième puissance mondiale, cette fracture sociale n’apparaît plus comme révoltante, comme devant être « réduite ». Elle n’est plus une monstruosité dans le paysage de ce que devrait être une harmonieuse fraternité historique.

Au contraire.

Aujourd’hui, en ce moment crucial où l’on va confier le plan de route de notre marche commune à la discrétion d’une ambition personnelle et clanique, la fameuse fracture, dans le conscient collectif, ne s’impose plus comme une montagne à aplanir, comme une brèche à colmater en vue de la réunion de toute la fratrie, mais comme un obstacle naturel et sélectif qui, selon que l’individu parviendra à le franchir ou non, désignera la place de chacun. Réduire la fracture appelait aux solidarités (aurait dû appelé…), la consacrer au rang d’Arbitre de la Grande Classification Universelle revient à transformer chaque citoyen en chacal. La France de la Fraternité se transforme moralement en meute de « machairodus » et l’instinct d’ « élévation sociale » personnelle, ou tout au moins de préservation de son propre statut, prend le pas sur et renie même la moindre idée de main tendue.

Tournant le dos à des décennies de philosophie du progrès social et d’élévation générale du bien-être commun, on en est arrivé, en quelques années de « catéchisme libéral » à n’envisager sa propre survie que par le droit d’exploiter sans vergogne les bipèdes censés nous servir. Décharnelisés, déshumanisés, déconscientisés, les « autres » ne sont plus que d’imparfaits robots réduits à merci. On doit pouvoir être servi à chaque instant, pour quelque tâche que ce soit. Elevé à la religion du « Tout toud’suite », le « citoyen » d’aujourd’hui pense être « quelqu’un » en exigeant du « guichetier » et de la « caissière » à toute heure du jour et de la nuit. Et, bien entendu, pour le moins cher possible. Car, si mon propre travail est évidemment insuffisamment rétribué, celui des autres est scandaleusement prohibitif. On doit être présent et disponible en permanence et ne pas coûter cher. C’est aujourd’hui le lot des « ceux d’en bas ».
« Travailler plus pour gagner plus ! ». C’est le slogan le plus scandaleux que j’ai jamais entendu. Et pourtant, il est partagé par la majorité des citoyens ! (sauf s’il s’agit de soit, bien entendu…). On trouve normal que l’autre se tape des heures et des heures de boulot pour pouvoir finir ses fins de mois. Toute revendication de hausse de salaire fait hurler au scandale, c’est ringard et anti-économique. La caissière de supermarché a du mal à joindre les deux bouts avec ses heures payées au Smic ? Que n’accepte t-elle de travailler le dimanche et les jours fériés ? Que n’envisage t-elle de faire quelques heures de ménage après sa journée de caisse ? Elle a des enfants, elle aimerait être plus présente auprès d’eux ? Ah, ça, bien sûr, si vous y mettez de la mauvaise volonté… Et puis, vous n’allez pas nous dire qu’il n’y a pas une faignasse de chômeur dans votre entourage pour s’occuper d’eux… Vous voyez, des solutions, il y en a, vous n’avez qu’à nous demander !
Jamais le « Travail » n’aura autant été mis en exergue par des candidats à la Présidentielle. Tous ou presque. Jusqu’aux Arlette et Olivier qui réclament des « crèches d’entreprise » pour que les esclaves femelles ne perdent pas leur temps et leur énergie à gérer la « nounouitude » de leur progéniture.
Il faut faire, il faut contraindre à travailler toujours plus, le plus longtemps possible, le plus vieux possible ! On en est arrivé à évoquer une « deuxième carrière » pour après l’âge de la retraite ! On envisage fortement d’obliger les chômeurs à accepter n’importe quel boulot sous peine de se retrouver au ruisseau et à la soupe populaire. Le syndrome de la « fourmilière » pèse de tout son poids sur la société. Fabriquer, brasser, vendre toujours plus pour que tourne encore et encore la machine à gaver de breloques les insatiables « Sapiens », les si mal nommés. Et bien sûr, il y a ceux qu’on laisse en dehors du système, crasseux, affamés, perdus, pour dissuader les inclus de prendre un peu de liberté. Celle-ci étant incompatible avec la bonne marche des affaires. Du Commerce !
Ce qui gêne les maîtres de nos destins et de notre vie dans la réduction du temps de travail, ce ne sont pas les heures de notre absence ( il y aurait plein de volontaires pour nous remplacer), ce sont les heures de notre Liberté ! Comme si on leur échappait un peu, comme si on les frustrait de leur emprise sur nous.
Pourquoi croyez-vous que Sarko s’en prend à Mai 68 ? Parce que sous le pavé de 68, il y a comme une idée d’affranchissement de l’homme et que cela est incompatible avec le Nouvel Ordre Economique et Commercial. La sympathique image de l’Entreprise- Famille (où pourtant chacun dévore l’autre à pleines dents) n’est qu’un subterfuge pervers qui incite le « travailleur » à sacrifier, à offrir de bon cœur son temps et sa vie au seul profit des sangsues qui le dévorent. Pas de place là-dedans pour une quelconque présence syndicale ! Pas de ça chez nous, monsieur, on est pas chez les Soviets ! On est moderne, merde !
Travaillons moderne ! C’est la devise. C’est à dire au Smic, au mérite, à la bonne bouille, à la « carpetisation », au rendement. Travaillons Commercial ! Commercial ! Ca veut dire vendons n’importe quoi qui brille, qui flashe, qui « tilte », qui « jette », qui épate la galerie, qui écrase les bouseux, n’importe quel gadget « archiàlapointe » qui métamorphose le grand singe balbutiant en parangon de la modernité sine qua non. Le Monde sera Commercial ou ne sera pas. Et l’homme en est la mécanique. Nous sommes des mécaniques ! Enfonçons-nous bien ça dans la tête ! Toi, moi, elle, lui, eux, nous, tous autant qu’on est sommes des pièces, des bouts de rouage de la Mécanique Commerciale. Rien d’autre ! Rien d’autre ! Et non seulement on nous assène cette réalité mais nous la prenons comme telle ! Sans dec’ !
Qui n’est pas persuadé qu’il doit avoir un métier, qu’il doit trouver un travail, que le travail c’est la dignité, que ses enfants doivent bien travailler à l’école pour avoir un bon métier, que la Famille est le seul horizon d’une vie dépourvue de socialité élargie, que l’on ne peut que se dépatouiller seul pour assurer la survie des siens, que bien vivre c’est bien consommer, consommer plus encore, qu’il n’y a rien qui puisse échapper à l’appétit humain, qu’un simple fonctionnaire a droit à faire chier les tortues des Galapagos comme un Américain ni plus ni moins, que chacun a droit à une bagnole super-sophistiquée qui se conduit presque toute seule pourvu qu’on fasse l’effort de bosser comme un malade pour payer les mensualités dont chacune pourrait nourrir des centaines de crève-la-faim sur la pierre de déserts brûlants dont personne a rien à foutre et après tout on est pas là pour supporter …

La NORMALITE !!! La vie humaine, c’est ça ! Et rien d’autre ! Qu’on se le dise !

Comme une malédiction !
Nous sommes appelés à voter MAUDITS ! CRUELS ! IMPITOYABLES ! AVEUGLES aux autres ! Puisqu’il est écrit quelque part que l’histoire humaine, ça doit être ça ! Puisqu’il est écrit quelque part que votre vie, que TA VIE, ça doit être ça ! Qu’il n’y a pas d’échappatoire !


Et moi je dis NON !
Et lui, et elle, et encore ceux-là et encore ces autres, là-bas, et encore et encore…
Tous, toutes, DEBOUT, à dire NON, NON, on ne veut pas de ce monde-là, de cette normalité-là, de cette humanité-là, hideuse, désespérante. Il y a encore des Humains debout, par milliers, par millions, par centaines de millions ! Et qui refusent de porter le masque de gueules de rouage de machine infernale !

Sarkozistes et autres "Libéraux" conscients ou inconscients, par hargne par lâcheté ou par bêtise, vous ne ferez pas plier des millions d’hommes debout. Ou alors, il faudra utiliser des moyens radicaux. Comme en d’autres temps…
Denis Marulaz.