L’Essence de son Être
« Blang ! Bloung !
Les quintalissimes portes
De bois noble
Et d’orgueilleuses ferrures
Se clorent, vivement, puissamment
Sur l’assemblée des doctes.
Trois cent vingt huit
Chapeaux pointus,
Détrempés déjà de la froide sueur
De trois cent vingt huit fronts
De grises Eminences
Se figèrent
Derechef
Au claquement sec
Des talons ferrés
Des huissiers à hallebarde.
La voix glaciale
Vipérine
Du Ministrium haut-perché
S’écoula,
Siffla
Au silence des travées :
«Savante Assemblée
De par nos indulgences,
Sa Majesté fait mander
Du savoir de chacun de vous
Ce qu’il en est
De l’essence de son Être.
Plaise à Dieu
Que nous ne nous séparions
Tant que lumière fût faite. »
Raclements de gorges,
Rectification des perruques poudrées,
Regards de biais,
Suffoquements contenus,
Dandinements de postérieurs
Sur la cire des bancs,
Centrifugation d’yeux
Exorbitations ahuries…
Nonobstant,
Il fallut bien s’y mettre…
Qui, parla d’Essence Divine
Qui, de Noble Matière,
Qui, de Lumineuse Présence,
Qui, d’Or Moléculal,
Qui, de Fluide Ethéré,
Qui, de Spirituelle Incarnation,
Qui, de Sainte Enveloppe,
Qui, qui, qui…
Le dernier des sages, tout vieux, tout courbé,
Fut appelé à la parole.
Lui aussi se racla la gorge,
Se redressa du mieux qu’il put,
Les deux mains sur sa canne,
Et dit :
« Toute vénérée qu’elle soit,
Toute sanctifiée soit sa personne
De par la grâce de Dieu
Et par l’amour de ses sujets,
Sa Majesté,
Comme chacun de nos misérables corps,
Comme l’entièreté de l’univers,
Est pétrie de poussière ! »
Ce furent ses derniers mots.
Jamais la geôle ne le rendit
Au monde des vivants.
Texte et Illustrations-Photos"ambiancées" D.M. alias Hombre de Nada 1974-2022.
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